Vous ne pouvez pas le voir à travers cette écriture formatée, mais mes mains sont tremblantes. Elles sont fébriles comme une paire de jambes en haut d’une piste qui n’a pas vu de poudreuse depuis quelques années. Et cette question qui résonne dans la tête : « Comment je m’y prends pour réattaquer ? ».
Tout ce silence, qui se traduit par un chômage littéraire pas tout à fait involontaire (serais-je aussi atteint de ce mal franco-français, le « cancer de l’assistanat » ?), m’impose donc de repartir sur de bonnes bases. La légèreté des mots qui sortent impétueusement, des phrases qui se construisent naturellement pour former un article à peu près présentable se perd vite. Je reconnais avoir ma part de responsabilité dans cet abandon temporaire de rédaction mais les circonstances après mon retour du Cambodge étaient légèrement aggravantes. Rattrapage de cours, études de cas à tout va, entretiens Skype pour un stage… Un retour en force en somme ! Au détriment de mon blog qui manquait cruellement d’actualisation comme la victoire manquait au Stade Rennais en cette fin de saison. Ce dernier weekend fut donc celui du réveil : un nouvel article inattendu et une victoire inespérée.
Séjour au Cambodge = Visite des Temples d’Angkor
Je pense que personne ne peut déroger à cette règle. Quand bien même certains voudraient se soustraire à ce fondement presque mathématique pour affirmer une sorte d’anticonformisme touristique, ceux-ci se tromperaient copieusement. Angkor, qui fut pendant des siècles une éminente cité du continent asiatique, est une pépite qu’il serait franchement idiot de louper. C’est pourquoi nous avons choisi d’en faire notre première étape au Cambodge.
Conduits par notre « tuk-tuk man » perso, nous arrivons sur le premier et le plus impressionnant de tous les temples d’Angkor : Angkor Wat.
Symbole de toute la nation, ce temple s’avère aussi être le plus vaste monument religieux au monde. Sa somptueuse silhouette vous attire naturellement et vous fait presque oublier cette lourde chaleur qui s’abat sur vous. Pas à pas vous approchez de l’édifice après une marche, ponctuée de pauses photographiques, pour traverser le cours d’eau et les jardins qui l’encerclent. Une fois dedans, on ne sait par quel bout commencer. Alors on se laisse guider par son instinct, les yeux grands ouverts on admire les innombrables galeries, statues, sculptures…
Une première visite qui place donc la barre très haut. Une visite qui suscite aussi cette question : Pourquoi ne nous parle-t-on jamais de ce grand nom de l’Histoire à l’école ? Franchement, ça fait bizarre de le découvrir tout en prenant conscience qu’on ignore tout de son passé. Qui a bâti cette cité monumentale ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?
Heureusement aujourd’hui on a Wikipédia, alors pour ceux qui se posent les mêmes questions, vous connaissez la marche à suivre. Et pour ceux qui ont juste envie d’en voir quelques photos, c’est là-dessous.
Trois bouteilles d’eau et quelques kilomètres plus tard nous arrivons à Angkor Thom. En fait c’est là que l’ancienne cité médiévale avait été bâtie. On a du mal à se rendre compte que près d’un million de personnes y vivait (à l’époque où Londres comptait 50.000 habitants…) étant donné que seuls quelques temples et palais ont survécu. On aperçoit des ruines de je ne sais quoi par endroit, mais pas grand chose qui ne laisse imaginer la puissance de la capitale de l’ancien Empire Khmer.
Parmi les temples qui n’ont pas été complètement détruits, celui qui mérite vraiment le détour est Bayon. Le roi un peu mégalo de l’époque qui ordonna sa construction aurait demandé que chacun des visages sculptés sur les tours du temple lui ressemble. Manière originale d’immortaliser son passage au pouvoir.
Le soleil n’est pas votre ami lors de cette visite. En plus de vous cramer la nuque il amoindrit sérieusement vos capacités physiques. Vous ne vous éternisez donc pas à Angkor Thom où les coins d’ombre se font rares. Mais vous appréciez l’étape suivante, Ta Prohm, un temple construit en plein milieu de la forêt. La forêt qui apparemment veut montrer que c’est elle la plus forte car les ruines du temple sont littéralement piétinées par de géantes racines d’arbre.
Enfin il y a ce temple dont j’ai oublié le nom, que les bœufs aiment côtoyer pour paître sur son gazon ou se recueillir auprès de Bouddha peut-être. C’est la seule chose que j’ai retenue de cette dernière étape. Fatigue et climat trop agressif pour nos organismes sensibles sont les responsables de ce désenchantement pour Angkor.
Désenchantement peut-être, mais cette journée ne m’a laissé que de beaux souvenirs. Et croyez-le, si c’était à refaire, j’y retournerais sans l’ombre d’une hésitation !
De la route, encore de la route, toujours de la route.
Après Angkor c’est à Phnom Penh, la capitale, que notre voyage s'est poursuivi. Il nous a fallu pas loin de sept heures de car sur des routes sportives avec un chauffeur qui klaxonne toutes les trois secondes. La fatigue était palpable à notre arrivée. Fatigue qui s’est vite transformée en énervement puisque après avoir posé un pied hors du bus, je faisais face à une foule de chauffeurs de tuk-tuk qui gueulaient tous plus fort les uns que les autres pour nous proposer leurs services. Enfin proposer, tout est relatif. Alors que certains vous choppent par le bras, d’autres choisissent la technique de l’acharnement et vous suivent à la trace sur une centaine de mètres tout en répétant « Tuk-tuk Sir ? Where do you go ? Tuk-tuk Sir ? ». Bienvenue à Phnom Penh !
Le soir même, on pensait déjà à notre départ car honnêtement Phnom Penh c’est pas ce qu’on fait de mieux comme ville touristique. Cependant, on a quand même voulu visiter le musée de l’ancienne Prison S-21 avant de partir. En fait, ce musée est là pour rappeler la cruauté du régime de Salot Sar, dit Pol Pot, qui a complètement anéanti le pays. Ce régime s’est soldé par un génocide du peuple cambodgien et l’enfoncement du pays dans une misère sans nom. Cette même question est revenue : « Pourquoi on ne nous dit jamais rien à l’école de ce drame de l’Histoire ? ».
Ce genre de visite fait froid dans le dos, mais j’ai aussi envie de dire que c’est un passage obligé pour tout visiteur du Cambodge. C’est une visite qui éveille la conscience, qui fait plus que jamais réfléchir et qui inspire un profond sentiment de compassion envers les cambodgiens. Cette prison, autrefois école, était en fait le QG de Pol Pot et ses bourreaux. Le théâtre des pires atrocités jamais commises pour faire parler les « conspirateurs de la révolution ».
L’émotion est forte quand vous croisez le regard des anciens prisonniers dont on a exposé les clichés. L’incompréhension vous tourmente quand vous entrez dans les cellules à peine plus grandes qu’un cercueil. Ce qui laisse imaginer le sort que l’on réservait aux détenus, hommes, femmes et enfants compris. Sept personnes ont échappé à ce destin cruel alors que vingt mille autres ont péri sous la torture dans cette prison.
Quelques heures après ce choc émotionnel nous reprîmes la route vers Battambang, petite ville au Nord du pays. Au revoir Phnom Penh et re-bonjour les routes pourries. Plus de chauffeur fou du klaxon mais cette fois on a eu droit au karaoké dans le bus. Après cinq heures de route et autant de variet’ khmère dans les oreilles on retrouve nos amis les « tuk-tuk man » plus que jamais décidés à nous emmener avec eux. Résigné, je les ignore alors que Juliette essaye de leur faire comprendre qu’ils sont pénibles. C’est qu’ils sont tenaces les chauffeurs de tuk-tuk à Battambang. Presque autant qu’à Phnom Penh. On choisit donc celui qui semble avoir une bonne tête et direction l’hôtel pour une douche qui se faisait désirer.
Tout beau tout propre, on part se faire une petite balade dans la ville pour constater que, comme à Phnom Penh, ambiance et animation ne sont pas folles. Après la tombée de la nuit, n’en parlons plus. La ville se désertifie, les rues s’emplissent d’obscurité, les bruits d’insectes, crapauds ou autres bestioles deviennent les seuls signes de vie… Bref, il est temps d’aller se coucher quoi.
Le lendemain matin on a choisi de prendre le « Bamboo train ». Ce moyen de locomotion sur rail est tout aussi original qu’archaïque. Assis sur une planche de bambou, elle-même montée sur deux essieux métalliques posés sur les rails, un petit moteur vous propulse à travers le paysage vert et très rural du Cambodge. Les secousses sont nombreuses, tout comme les moucherons gobés. Après une escale dans un petit village et la rencontre de deux bouts de choux qui nous ont fait la visite d’une fabrique de poteries, nous sommes repartis à bord train de bambou vers Battambang où le bus pour Bangkok nous attendait.
Arrivée à Bangkok après sept heures de route (encore !) et fin du périple cambodgien. Malgré un début en fanfare avec la visite des temples d’Angkor, notre séjour ne nous pas enchantés autant qu’on l’espérait. Le Cambodge est encore un pays très pauvre qui s’ouvre petit à petit aux touristes. Ce qui explique certainement le manque d’animations et activités dans certaines villes. Mais c’est un séjour que nous ne regrettons absolument pas car il a été vraiment enrichissant et bien sûr très beau. Nous regrettons seulement notre manque d’organisation préalable qui nous a valu plus de vingt sept heures dans les transports en quatre jours… C’est aussi une des explications à notre mini déception. Mais pour ça, on ne peut s’en prendre qu’à nous-mêmes. Donc, petit conseil pour les futurs Cambodia-trotters : organisez-vous ! Bon vent.